Vacance commerciale : comprendre les causes et y remédier grâce à la data
Qui, de nos jours, n’a pas constaté la multiplication des locaux commerciaux vides, en particulier dans nos centres-villes ? Cela donne clairement un sentiment de déshérence et de perte d’attractivité du centre-ville. Les acteurs de l’aménagement urbain, les collectivités territoriales et les professionnels de l’immobilier se préoccupent de ce sujet. Au-delà de l’image renvoyée, la vacance commerciale pèse économiquement sur les communes, diminue les recettes fiscales et freine la dynamique entrepreneuriale.
Mais pour agir efficacement, encore faut-il bien comprendre les causes de ce phénomène complexe. Et surtout, savoir s’appuyer sur des données fiables pour cibler les bons leviers d’action. Aujourd’hui, la data est un véritable allié pour analyser, anticiper et lutter contre la vacance commerciale.

Comprendre les causes de la vacance commerciale
a) Des mutations économiques et sociétales profondes
La première explication de la vacance commerciale réside dans les changements structurels de notre société. Le développement du e-commerce, qui représente plus de 14 % du commerce de détail en 2025, a fortement réduit le besoin de présence physique pour de nombreuses enseignes. De plus, les habitudes de consommation se sont fragmentées : recherche de circuits courts, achats sur mobile, livraison à domicile ou en point relais.
Ajoutons à cela l’essor du télétravail, qui a déplacé une partie de la consommation des quartiers d’affaires vers les zones résidentielles. Cette reconfiguration des flux humains modifie la rentabilité de certaines zones commerciales, parfois jadis très dynamiques.
b) Des causes locales : dégradation, accessibilité, offre inadaptée
Au-delà des tendances nationales, de nombreux facteurs locaux accentuent la vacance commerciale :
- Une dégradation du cadre urbain : espaces publics délaissés, insécurité perçue, mauvaise entretien.
- Un manque de stationnement ou une accessibilité insuffisante en transports en commun.
- Une offre commerciale redondante ou inadaptée aux besoins des habitants (ex. : trop de coiffures, pas assez de restauration).
- Des locaux trop grands, mal configurés, non conformes aux normes.
c) Une mauvaise anticipation dans l’aménagement
Dans de nombreuses communes, les implantations commerciales passées ont été réalisées sans analyse fine de la demande locale. On a vu apparaître des zones commerciales périphériques en décalage avec les besoins réels, provoquant un déclin des commerces de centre-ville. Parfois aussi, certaines rues sont restées longtemps figées, sans renouvellement, laissant place à l’obsolescence commerciale.
La data : un levier clé pour objectiver et anticiper
Face à ce constat, la donnée devient un outil indispensable pour passer d’une logique d’intuition à une logique d’intervention ciblée.
a) Cartographier la vacance commerciale
Grâce aux données cadastrales, aux bases foncières (comme DVF ou Géo-DVF) et aux enquêtes locales, il est aujourd’hui possible de créer des cartes précises des cellules commerciales vacantes : localisation, taille, ancienneté de la vacance, dernier locataire connu.
Ces cartographies permettent de visualiser les poches de vacance et d’identifier les zones à forte tension ou au contraire les zones à fort potentiel de redéploiement.
b) Comprendre les flux et l’environnement
Les données issues de la téléphonie mobile ou des capteurs urbains permettent d’analyser les flux piétons et véhicules. Couplées à des données démographiques (INSEE, fichiers locaux), elles permettent de comprendre le profil des usagers d’un quartier : habitants, actifs, visiteurs occasionnels.
En croisant ces données avec les horaires, les jours de la semaine et les saisons, on peut identifier les zones mal exploiteées ou au contraire sous tension, et adapter l’offre commerciale en conséquence.
c) Analyser l’adéquation offre-demande
La data permet également de comparer l’offre commerciale existante avec la demande potentielle. Par exemple, dans un quartier jeune, dynamique et bien desservi, l’absence de restaurants ou de tiers-lieux peut apparaître comme une opportunité. A contrario, un quartier vieillissant avec un excès de franchises de fast-food peut souffrir d’une inadéquation entre l’offre et les attentes locales.
Les leviers d’action à activer grâce à la data
a) Réactiver les cellules vacantes
Une fois les zones prioritaires identifiées, les collectivités peuvent mettre en place des dispositifs de réactivation :
Pop-up stores ou boutiques éphémères pour tester un usage.
Appels à projets ciblés avec aides à l’installation.
Exonérations fiscales temporaires pour les premiers locataires.
La data permet de justifier ces actions en apportant une objectivation des besoins.
b) Mieux cibler les porteurs de projets
Les porteurs de projets peuvent être guidés vers les emplacements les plus prometteurs grâce à des plateformes d’aide à l’implantation. En fonction de leur activité, de la taille de leur local et de leur budget, ces outils croisent les données pour proposer des localisations stratégiques.
Cela permet aussi aux mairies de mieux orienter leurs aides ou de promouvoir des secteurs spécifiques (artisanat, alimentation locale, services à la personne).
c) Définir une stratégie de redynamisation
La connaissance précise du tissu commercial permet de définir une politique publique d’intervention ciblée :
Redonner de la place à certains usages (tiers-lieux, culture, logistique du dernier kilomètre).
Travailler sur les rez-de-chaussée inoccupés dans le cadre de la revitalisation urbaine.
Adapter les règles d’urbanisme (PLU, droit de préemption commerciale).
Cas d’usage : comment les données ont permis de réduire la vacance
a) L’exploitation des données territoriales publiques
Des jeux de données comme Géo-DVF (données foncières), les flux de mobilité INSEE ou les observatoires des loyers permettent d’avoir une vision objective des dynamiques à l’œuvre sur un territoire. Leur exploitation est de plus en plus encouragée dans le cadre de dispositifs nationaux comme Action Cœur de Ville.
b) L’accompagnement via des foncières ou EPF
Certaines collectivités collaborent avec des établissements publics fonciers (EPF) ou montent des foncières pour acquérir, regrouper ou réhabiliter des locaux. Cela permet de maîtriser l’offre et de mieux la calibrer à la demande identifiée par la data.
Pour résumer
La vacance commerciale n’est pas une fatalité. Si les mutations économiques et sociétales bouleversent les modèles traditionnels, elles offrent aussi de nouvelles opportunités d’adaptation. Encore faut-il s’appuyer sur des données solides, croisées et contextualisées.
La data permet de comprendre les causes réelles de la vacance, de cibler les zones prioritaires, d’adapter l’offre et d’accompagner les porteurs de projets avec une vision stratégique. C’est une clé pour réinventer nos centres-villes, rendre les territoires plus résilients et favoriser une nouvelle dynamique commerciale plus qualitative, plus locale et plus durable.
Que l’on soit collectivité, gestionnaire de foncier ou investisseur, la lutte contre la vacance commence par une bonne lecture du terrain. Et cette lecture passe aujourd’hui par les données.