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Immobilier commercial : 5 tendances à surveiller en 2025

Mise à jour le 16/09/2025

On a beau parler d’IA et de numérique, rien ne remplace la déambulation dans une rue commerçante vivante. Pourtant, en quelques années, l’immobilier commercial a été secoué comme jamais : crise sanitaire, inflation, changements d’habitudes de consommation… On pourrait croire que tout est incertain. Mais justement, dans cet apparent chaos, émergent des tendances fortes et passionnantes. Après avoir arpenté quelques salons spécialisés, discuté avec des commerçants et plongé dans les derniers rapports des grands cabinets, voici, selon nous (et de nombreux experts), les 5 grandes tendances à ne pas perdre de vue en 2025.

rue commerçante et immobilier commercial

Le retail hybride : la nouvelle norme

Vous souvenez-vous de l’époque où il y avait d’un côté les boutiques physiques, et de l’autre le e-commerce ? Cette frontière n’a plus vraiment de sens en 2025. On assiste à une explosion du “retail hybride”, cette fusion intelligente entre le monde réel et le digital.

Prenez Nike, par exemple. La marque a lancé des boutiques expérientielles où l’on peut essayer, scanner, commander, et repartir sans même passer par la caisse. En France, des enseignes comme Jimmy Fairly ou Sézane ont bâti tout leur développement sur l’omnicanal : l’adresse physique devient un point de contact émotionnel, tandis que l’achat se fait parfois… depuis le canapé.

Ce mouvement est massif. Selon la Fevad, près de 60 % des e-commerçants considèrent l’omnicanal comme leur principal levier de croissance pour les prochaines années, et la part du click & collect dans les ventes a doublé depuis la pandémie. 

De son côté, Knight Frank souligne que « les enseignes multicanales sont aujourd’hui les plus résilientes, portées par la montée en puissance des expériences hybrides ».

Mais ce n’est pas qu’une question de technologie. Derrière le retail hybride, il y a aussi l’idée que le commerce redevient une expérience, un lien, un moment. Et c’est probablement cette humanité retrouvée qui fait toute la différence.

Le retour du commerce de proximité et le triomphe du “localisme”

Qui aurait parié il y a dix ans sur le retour en force de la supérette de quartier ? Pourtant, depuis la crise sanitaire, la notion de “commerce de proximité” s’est imposée dans le quotidien des Français. Elle rejoint l’idée de la “ville du quart d’heure” : chaque habitant doit pouvoir accéder à l’essentiel à pied ou à vélo en moins de 15 minutes.

Les enquêtes récentes confirment cette aspiration. Selon une étude Médiaposte / Infopro Digital réalisée en 2023, 85 % des Français fréquentent régulièrement les commerces de proximité et près de 70 % estiment qu’ils participent à la vitalité de leur quartier (ecommercemag.fr, 2023). De son côté, l’INSEE souligne que le commerce alimentaire de proximité a mieux résisté que les grandes surfaces pendant la crise sanitaire, et que ces formats continuent de bénéficier d’une croissance plus soutenue depuis 2020 (insee.fr, “La situation du commerce en 2023”).

Cette dynamique n’est pas synonyme de retour en arrière : la plupart de ces commerces misent désormais sur la digitalisation, le click & collect, la livraison rapide et la communication locale. Une enquête nationale menée auprès de 1 200 commerçants par le Conseil du Commerce de France et les CCI en 2023 montre d’ailleurs que la majorité des commerçants de proximité investissent dans leur visibilité numérique et considèrent la proximité comme un atout concurrentiel (cci.fr, 2023).

Pour l’immobilier commercial, cette tendance change la donne. Les emplacements n°1 en centre-ville redeviennent des valeurs sûres. Selon le CBRE Market Outlook 2024, le taux de vacance en centre-ville dans les grandes métropoles françaises est repassé sous la barre des 8 % fin 2023, en nette amélioration par rapport à 2021. Cette résilience des centres-villes s’accompagne d’une prime de valorisation des actifs commerciaux bien situés, renforçant l’attractivité de l’investissement dans le cœur urbain (cbre.fr, 2024).

Centres commerciaux : la grande mutation

On a tous vu des images de galeries désertées, de locaux vacants, de rideaux baissés. Faut-il en conclure à la mort des centres commerciaux ? Sûrement pas : une transformation profonde est à l’œuvre.

Les chiffres confirment une situation contrastée : en 2023, la fréquentation des centres commerciaux a progressé de +1,9 %, avec une prime nette aux centres-villes (+11,2 %).

Ce qui attire désormais, ce sont des lieux de vie mêlant restauration, loisirs, santé, culture, services et coworking ; les centres qui diversifient leurs usages sont les plus résilients (Cushman & Wakefield – Les grandes mutations des centres commerciaux).

Exemple parlant : à Lyon, Westfield La Part-Dieu a accueilli 29,8 millions de visiteurs en 2023 (+6 % vs 2022) après rénovation.

Dans l’ensemble, le secteur se recompose : rénovation des sites, montée de la mixité d’usages et repositionnement en “destinations” (BNP Paribas RE – At a Glance 2024 T1 – Commerce France).

L’immobilier “responsable” : urgence climatique et pression réglementaire

En France, le cap est clair : le dispositif Éco-Énergie Tertiaire (EET) impose une baisse des consommations d’énergie finale d’au moins –40 % en 2030, –50 % en 2040 et –60 % en 2050 (vs. une année de référence), avec déclaration annuelle sur la plateforme OPERAT (ADEME). Les bâtiments (ou ensembles) à usage tertiaire ≥ 1 000 m² sont concernés, avec des sanctions possibles en cas de non-déclaration ou de non-respect.

Au-delà de la conformité, la dimension valeur devient centrale. Les analyses de CBRE montrent des “green premiums” avérés et, à l’inverse, des décotes pour les actifs « bruns ». Par exemple, les bureaux disposant d’une certification environnementale enregistrent ≈ 6 % de prime locative par rapport aux actifs comparables non certifiés (CBRE, 2023).

Côté investisseurs, la soutenabilité reste un moteur majeur des décisions en Europe : stratégie de dé-risquage, exigence réglementaire et maîtrise des coûts énergétiques poussent à verdir les portefeuilles et à aligner actifs et baux sur des trajectoires bas-carbone (JLL – Sustainability remains a key driver for European real estate investors).

La demande consommateurs va dans le même sens : selon le Baromètre GreenFlex–ADEME 2024, 65 % des Français déclarent changer de magasin pour se tourner vers des options plus engagées (producteurs locaux, magasins bio, etc.) et 4 sur 5 estiment que la crise climatique impose de revoir nos modes de consommation.

Traduction opérationnelle pour le retail et les foncières : accélérer les rénovations énergétiques (enveloppe, équipements, GTB), déclarer et piloter ses consommations sur OPERAT, et valoriser des aménagements bas-carbone (éclairage LED, chaleur/froid décarbonés, matériaux à faible empreinte). Des ressources pratiques et synthèses sont disponibles sur les portails officiels (ministère, DRIEAT, ADEME).

La data, nouvel or noir du secteur

Le retail et l’immobilier commercial basculent dans un pilotage data-driven : flux piétons, chiffre d’affaires, vacance, loyers, profils de clientèle et sociodémographie locale se combinent désormais pour décider d’un emplacement, d’un mix-enseignes ou d’un loyer. Côté fréquentation, la fédération professionnelle FACT publie depuis 2023 des indices construits avec des partenaires d’analyse de flux, afin de suivre les visites en sites commerciaux et l’activité de consommation (communiqué annuel FACT 2024).

Pour objectiver le potentiel de marché d’une zone, les acteurs croisent des données ouvertes et des données privées :

Les plateformes métiers facilitent ce croisement de données et l’aide à la décision :

  • Mytraffic pour analyser les flux piétons (benchmarks de centres commerciaux, classements d’emplacements, tendances) — voir leurs études marché récentes (Mytraffic – Market Studies) ;

  • Codata pour l’observatoire du commerce, la cartographie des sites et emplacements, et des indicateurs comme la vacance ou la composition d’enseignes (Codata – Observatoire du commerce).

Pour monitorer la performance, les directions retail s’appuient aussi sur des baromètres conjoncturels (ex. Banque de France – Commerce de détail, suivi mensuel des ventes en volume) et sur des rapports retail orientés paiement/omni-commerce (ex. Adyen Index Retail 2025) :

Enfin, la compétence data se diffuse dans les équipes immobilières et retail (asset/lease managers, expansion, research). Les référentiels métiers confirment la forte demande pour le rôle de data analyst en France (fiche APEC “Data analyst”) et l’essor des usages digitaux chez les TPE-PME (voir le Baromètre France Num 2024 – DGE).

En pratique

Un bon montage d’étude retail croise DVF/DVF+ (valeurs), BPE/IRIS/Carreaux 200 m (offre & population), BAN (géocodage), flux piétons (Mytraffic/FACT) et KPIs de caisse & paiement (Banque de France/rapports sectoriels), plus une veille de demande (ex. Google Trends).

Conclusion : 2025, l’année du passage à l'échelle

2025 n’est pas l’année des paris hasardeux, mais celle de l’exécution. Les signaux sont clairs : le retail hybride devient la norme, la proximité reprend de la valeur, les centres commerciaux qui réussissent sont ceux qui se réinventent par la mixité d’usages, l’immobilier responsable s’impose par la réglementation autant que par la valeur, et la data devient le langage commun entre enseignes, investisseurs et collectivités.

Pour transformer ces tendances en résultats, visez un plan d’action concret :

  • Omnicanal : clarifiez le rôle de chaque point de vente (showroom, retrait, ship-from-store), systématisez le click-and-collect et l’appointment, et mesurez la capture de données first-party en magasin.
  • Proximité : ciblez des formats compacts et des emplacements de ville du quart d’heure, adaptez l’offre au quartier et renforcez l’activation locale (CRM, partenariats, logistique du dernier km).
  • Centres en mutation : investissez dans l’expérience et la mixité (restauration, loisirs, santé, services publics, coworking) ; suivez des KPIs d’attractivité (fréquentation, durée de visite, taux de vacance, mix enseignes).
  • Responsable / EET : bâtissez une trajectoire –40 % d’ici 2030 avec audit énergétique, plan CAPEX 2025-2030, quick wins (LED, GTB, CVC), et déclarez vos consommations sur OPERAT.
  • Data-driven : industrialisez votre stack (open data + données métiers), outillez-vous pour cartographier, comparer et décider (Urban Metrics, complété selon besoins par Mytraffic/Codata), et cadrez des rituels de décision mensuels.

Investisseurs, commerçants, collectivités : l’avantage revient désormais à ceux qui passent du POC au déploiement et qui documentent leurs choix par la donnée. À vous de jouer.

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